vendredi 31 juillet 2020

Hier à Loulé...

     Nous partons après onze heures trente pour Loulé, une ville relativement étendue près de Faro. Le trajet dure une cinquantaine de minutes. Une fois la Cuore garée dans un vaste parking gratuit au sol inégal en terre battue près du centre, nous effectuons un jeu de piste pour trouver les trois restaurants repérés par Patrick sur Internet. Nous arrivons sur la Praça Dom Afonso III surplombée par les deux tours carrées du château médiéval. Je prends une photo devant un massif de fleurs mauves pour embellir le premier plan. Une dame et son bébé, assis sur un banc de la place aux larges degrés en dénivelé (je pense à Québec), me gratifient de superbes sourires qui m’apportent de la joie au cœur. La folie des masques en Espagne m’a privé de bien des sourires. Nous passons devant le bel édifice rose de caractère, aux encadrements blancs, de la société immobilière Ombria. Le premier restaurant, Vegan Joe's, est définitivement fermé. Je prends en photo une statuette sur le rebord intérieur d’une fenêtre ouverte d’une habitation le long de la rua de Portugal. Le second établissement semble en congé et le troisième, un restaurant chinois, privé de terrasse, montre des gens masqués qui font la queue. Nous partons à la recherche d’un autre endroit pour déjeuner. Nous repassons devant le superbe édifice du Mercado Municipal de Loulé embelli d’arches cintrées sur les deux façades principales, aux atours crème et gris clair soulignés de rouge sang, qui dévoile de belles tours mauresques aux bulbes rouges et une entrée principale magistrale. Nous jetons notre dévolu sur le « Café Calcinha » situé le long de la rue Praça da República. Nous déjeunons en terrasse en présence du poète António Aleixo installé à sa table habituelle qu’il occupa souvent de son vivant et qu’il devrait occuper pendant de nombreuses années encore. Son regard impavide se pose sur nous dans une vision atemporelle. Né à Vila Real de Santo António à la fin du dix-neuvième siècle, António est mort comme sa fille avant lui de la tuberculose à Loulé le mercredi 16 novembre 1949. Une folie « sanitaire » sévissait déjà à cette époque, car plusieurs cahiers de ses poésies furent brûlés en raison de la peur et de l’ignorance liées à la maladie infectieuse qui emporta le poète dans sa cinquante et unième année. Une perte irréparable d'un héritage irremplaçable dans le monde de la poésie. Ami fidèle du poète et écrivain Miguel Torga dans la dernière partie de sa vie, António Aleixo fut considéré comme l'un des poètes le plus populaire au Portugal. Sa brillante ironie et sa critique sociale pertinente présents dans ses vers, sa simplicité, son humilité et sa modestie, concoururent à donner naissance à une œuvre poétique singulière dans le panorama littéraire lusophone. Dans son parcours de vie mouvementé, outre son activité littéraire, António exerça divers métiers pour « joindre les deux bouts », tels que tisserand, policier, tailleur de pierre... Il exécuta cette dernière activité lors de sa période d’émigrant en France. Le centre culturel aux superbes tourelles en face du restaurant Taska da Vila à Vila Real de Santo António, où nous avons déjeuné dernièrement, porte son nom.
     Nous optons pour une délicieuse soupe de légumes, pour une quiche aux légumes servie avec des feuilles vertes, des brisures de carotte et deux grosse rondelles de tomate. Je suis du regard sur le trottoir opposé une superbe jeune femme, habillée d’un fourreau estival bleuté amplement décolleté, une longue chevelure blonde bouclée ondulant jusqu’à ses reins au rythme de ses pas cadencés. Les minutes s’évanouissent agréablement dans le mouvement des passants qui se croisent devant notre table. Patrick sirote un thé noir Tetley en fin de repas. Nous retournons ensuite au parking pour nous rendre au centre commercial « Mar Shopping Algarve » situé dans la périphérie d’Almancil, près de Loulé. En chemin, nous nous attardons à l’entrée d’une petite cour intérieure devant un ancien véhicule à trois roues, bleu roi, qui semble se reposer d’une vie bien remplie dans une encoignure ombragée. Le bandeau en haut du pare-brise laisse lire les mots : « Algarvespa Concessionárià Vespa Piaggio Gubra – Almancil ». Attaquée par la rouille, le pneu arrière gauche à plat, les essuie-glace hors d’usage, le porte-bagage éclopé sur la toiture, le vitrage agréablement asymétrique des portières reflétant l’arrière-cours, les deux phares avant rectangulaires à l’acuité visuelle parfaite, la Vespa s’apprête à passer une retraite bien méritée sous le regard occasionnel des passants. Cette moto fourgonnette « Ape 50 [abeille en italien] » et ses consœurs furent inventées par Enrico Piaggio et Corradino d'Ascanio. Le modèle Ape 50, légendaire et glamour, a vu le jour chez le constructeur italien à partir de l’année 1969 pour connaître un succès immédiat ; il se faufilait partout dans les embouteillages et se garait n’importe où. Le premier modèle de la gamme fut présenté à la Foire Internationale de Milan en 1946.

     Après quinze heures, nous arrivons au centre commercial. La folie liée à la crise liberticide qui s’éternise sans motifs pertinents oblige, au Portugal, à porter un masque ou une visière dans les commerces ; uniquement dans les commerces, heureusement !... Patrick met un masque et je mets une visière. Nous nous rendons chez Primark sans flâner. Nous achetons des vêtements d’été dont des tee-shirts colorés à deux euros. Nous « craquons » chacun pour une chemisette fantaisie à cinq euros. Daniella nous accueille à la caisse. Je décèle un franc sourire sous son masque. Nous nous rendons ensuite chez Diechmann où, une quinzaine de minutes plus tard, j’achète une paire de chaussures légères estivales. Le hasard faisant bien les choses, je trouve une paire de chaussures de la marque Claudio Conti, la même que celle que je porte aux pieds, usée, achetée à Genève il y a quelques années. Après un bref passage dans un troisième magasin où nous ressortons sans avoir trouvé ce que nous cherchions, nous retournons au parking couvert sans prendre le temps de visiter le vaste complexe commercial aux nombreuses boutiques. Nous refusons de cautionner cette folie du masque et nous limitons nos achats à l’essentiel. Juste une petite exception, nous entrons et sortons du Starbucks Coffee après un bref coup d’œil. Patrick prend le volant pour le retour. Je profite du paysage plus montagneux que celui autour de Vila Nova de Cacela. De belles maisons se dévoilent de temps à autre. Nous sommes de retour chez nous pour la pause de dix-sept heures trente.
     Après le dîner, nous allons nous promener vers la maison cathédrale en faisant la boucle dans l’autre sens. Je photographie un arbre aux racines proéminentes et à la ramure ébouriffée. Deux lanternes éclairent l’entrée de la « Casa da Linha »…



 António Aleixo


 Mercado Municipal de Loulé


 siège de la société immobilière Ombria


 statuette sur le rebord intérieur d’une fenêtre ouverte







 modèle Ape 50 légendaire et glamour


 centre commercial « Mar Shopping Algarve » 






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