samedi 3 octobre 2020

De Puertollano à Puerto de Sagunto…


 Le petit déjeuner se déroule au restaurant de l’hôtel Santa Eulalia. Une charmante employée masquée s’occupe du service. Premiers clients dans la salle, nous nous sommes servis au buffet avant sa venue. Elle prépare un café pour Patrick. Un couple et une famille avec un adolescent arrivent. Le coronavirus, présent contre son gré suite à l’actualité diffusée en boucle, désorienté par l’incohérence liée à son existence, ne sait plus qui il doit infecter. Les clients assis posent le masque et le mettent dès qu’ils se lèvent. Le coronavirus se demande si une bulle invisible protège les clients quand ils sont assis. Toutefois, comme il peut s’approcher du nez et de la bouche avec succès, il se dit que ces humains vivent vraiment dans la confusion. Sur la quarantaine de chambres de l’hôtel, quatre d’entre elles seulement sont occupées. Je prends en photo la liste des résidents en sortant de la salle du restaurant.

  Une fois les bagages terminés, nous allons au parking fermé, distant d’environ cinq cents mètres, pour venir garer la voiture devant l’entrée de l’hôtel. Une dizaine de minutes de conduite s’envole tant le nombre de rues en sens unique est important. Une fois nos affaires chargées dans le coffre, nous allons effectuer le règlement. Je vois sur le comptoir de la réception que le journal El País du jour titre : « Madrid, capital cerrada » [Madrid, capitale fermée]. Je prends le volant. Nous entrons l’adresse de notre destination dans le gps intégré au tableau de bord. Il nous faut slalomer dans les ruelles en pente, en raison des sens uniques, pour pouvoir atteindre la route qui va nous emmener vers l’entrée de l’autoroute. La voiture est arrêtée sur le bas-côté pour prendre une photo panoramique de Puertollano. L’autoroute est presque déserte. Je règle le tempomat sur cent vingt kilomètres à l’heure. La conduite est agréable. Le ciel est bleu et la température grimpe lentement à l’extérieur. Plus avant, nous voyons apparaître sur la droite un impressionnant océan noir de panneaux photovoltaïques ; des milliers de panneaux solaires répartis sur nombre d’hectares. Le paysage défile plaisamment. Nous remarquons, tour à tour sur la droite, deux stations-service pourvues d’un restaurant qui sont à l’abandon. La dégradation due aux années écoulées est déjà avancée.

  À treize heures, avant la ville de Villarrobledo, nous sortons de l’autoroute gratuite quand Patrick aperçoit une aire de repos. La voiture est garée devant le grand bâtiment du restaurant « Vértice de la Mancha » de l’Area de Descanso. Nous entrons au pôle Nord au restaurant tant la température est glaciale. Les mets végétariens sont rares comme le platine. La serveuse, quelque peu bourrue, nous indique un seul plat végétarien sur le menu, en espagnol uniquement. Elle propose une salade en second plat. Bon an, mal an, nous acceptons. Une poêlée de poivrons rouges en sauce tomate et huile d’olive est apportée. Nous l’apprécions avec une salade verte sommaire où quelques grains de maïs et filaments d’une carotte en bocal donnent de la couleur. Le patron qui s’occupe du bar ne porte pas de masque à l’image de Donald Trump. Le personnel et les clients ont chacun leur méthode pour porter le leur ; tout cela n’a rien à voir avec le fléau viral dont la seconde vague surfe sur l’incohérence des politiciens et des experts médicaux aux œillères egotiques. Après le repas, je décide de laisser le masque sur la table et je me rends aux toilettes pour me rincer les dents.

  Une fois l’addition réglée, nous quittons le pôle Nord pour revenir en Espagne. Nous continuons de rouler sur l’A-43, l’autovía Extremadura - Comunidad Valenciana qui va nous emmener à la rencontre de l’A-7, l’autovía del Mediterráneo qui longe la côte méditerranéenne. Les quinze heures approchent quand, cette fois, c’est une mer d’éolienne qui apparaît à perte de vue. Une vingtaine de minutes plus tard, nous entrons dans la Province de Valence. Les plaines à perte de vue se sont éloignées. Nous traversons des ravins aux paysages magnifiques. Des ruines séduisantes, un château mauresque où a pris place une exploitation viticole, se dévoilent. Plus avant, un peu avant seize heures, nous traversons le viaducto d'El Buñol. L'impressionnant viaduc, de près de deux kilomètres de long, est l'un des plus importants d'Espagne. À seize heures sept, nous accédons à l’autoroute A7 ; Barcelone est annoncé à quelque trois cent cinquante kilomètres. À l’extérieur, le tableau de bord annonce une température de vingt-cinq degrés ; en fin de matinée il faisait environ dix degrés dans la ville de Puertollano qui est située à presque mille mètres d’altitude.

  Nous arrivons à destination à seize heures trente à Puerto di Sagunto. Le ciel est grand bleu et le soleil brille. Le vent souffle à perdre haleine. Ismael nous accueille à l’hôtel Exe sur l’avenida Ojos Negros. Il nous attribue la chambre 122. Le jeune homme masqué est sympathique. A défaut de voir les traits de son visage, j’apprécie le timbre de sa voix flûtée qui est agréable. Sa mère est espagnole et son père marocain. Nous nous installons, nous sirotons un thé et nous allons nous promener vers la playa del Puerto de Sagunto ; distante d’un peu plus d’un kilomètre. En chemin, nous nous attardons devant des maisons bessonnes jumelées dont les toits ondulent sous le ciel bleu. Certaines sont habitées et bien entretenues. D’autres jumelles, abandonnées à leur sort, subissent les assauts du temps et les graffitis malencontreux. Plus avant, les ruines d’un domaine retiennent notre attention. Une tourelle circulaire attenante au plus grand corps me séduit. Nous arrivons sur la plage au sable ocre crème. Les vagues fougueuses se succèdent dans une mélodie agréable. Je suis captivé par la jetée [pantalán] de Puerto de Sagunto dont une partie s'est effondrée en raison d’une violente tempête qui a frappé la région en fin d’année passée. Une autre tempête le lundi 20 janvier de cette année a provoqué l’effondrement d’une autre section de la jetée. Un projet de réhabilitation se dessine pour l'année 2022. L'histoire du port de Sagunto, et donc de la jetée, est étroitement liée à l'homme d'affaires basque Ramón de la Sota qui fonda la Compañía Minera de Sierra Menera en 1900. Ramón cherchait un débouché sur la mer pour exporter le minerai de la mine Ojos Negros à Teruel ; ainsi naquit Puerto de Sagunto. Dix-sept ans plus tard, Ramón fonda également la Compañía Siderúrgica del Mediterráneo dont les hauts-fourneaux commencèrent à fonctionner trois ans plus tard… Nous renonçons à marcher sur le bord de mer, car le vent souffle et soulève le sable qui entre dans les yeux. Nous décidons de retourner à l’hôtel. Je marche à reculons pour pallier cette situation inconfortable. Je prends une photo de mes pas que le vent estompe rapidement. Nous reprenons la passerelle en bois qui sinue légèrement pour rejoindre la route. Plus avant, je prends en photo la fresque du Buddha shisha lounge. De splendides eucalyptus ou platanes, élancés et vénérables, muent le long du trottoir…





























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